Evaluer les évaluations nationales CE1

Publié le par Collectif Ecoles Ouest Lyonnais

-Si vous trouvez normal de n’évaluer que les compétences de français et de mathématiques

-Si vous trouvez efficace la notation binaire Tout juste / Tout faux

-Si vous trouvez logique de procéder à des évaluations de compétences n’ayant, pour certaines, pas fait l’objet d’une étude approfondie en classe au préalable

 

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J
<br /> Quiconque s'intéresse un tant soit peu à l'éducation ne peut qu'en<br /> convenir : oui, comme le rappelle le ministre la main sur le coeur, il<br /> faut travailler à combler les inégalités, offrir à chaque élève une<br /> éducation de qualité et épanouissante, permettre à chacun de maîtriser<br /> les compétences nécessaires à une vie libre et consciente. Les principes<br /> sont inattaquables, consensuels dans l'absolu. Mais la façon dont les<br /> interprète Fillon, pour peu qu'on étudie dans le détail ses<br /> propositions, est bien éloignée de ces généreux élans du coeur. Encore<br /> une fois, la langue de bois politicarde vient fort à propos farder et<br /> rendre présentable la vieille idéologie ultra-libérale, toujours plus<br /> féroce et sanglante, que l'on travestit en noble dame patronnesse pour<br /> mieux nous vendre le projet de société le plus régressif et le plus<br /> violent qu'une réforme de l'école puisse porter. Jugez-en plutôt :<br /> <br /> 1) Trois objectifs, quatorze propositions, et déjà des contradictions.<br /> <br /> Fillon nous annonce sa volonté, ô combien louable, de « réduire l'échec<br /> scolaire en prenant l'engagement de garantir à tous les élèves, au terme<br /> de leur scolarité obligatoire, la maîtrise des savoirs et des<br /> compétences indispensables afin de poursuivre leur scolarité dans les<br /> meilleures conditions, ainsi que d' « élever le niveau général de tous<br /> les élèves pour atteindre effectivement les objectifs de 100 % de<br /> qualification et de 80 % au niveau du baccalauréat » » (Cf. « Les 14<br /> propositions de F. FILLON pour l'école », introduction). Pour cela, il<br /> se donne trois objectifs à atteindre : rendre l'école « plus efficace »,<br /> « plus juste », plus « ouverte ». Ces trois axes reposent sur quatorze<br /> points précis qu'il serait fastidieux de reproduire ici, mais que l'on<br /> peut déjà regrouper en tendances bien marquées, lesquelles sont,<br /> malheureusement, parfaitement en contradiction avec les buts fixés. Ainsi :<br /> <br /> - « Garantir à tous les élèves la maîtrise d'un socle commun », socle<br /> qui sera « validé tout au long de la scolarité obligatoire »<br /> (propositions n°1 et 2) : on nous présente ceci comme une garantie<br /> d'offrir des possibilités de soutien et d'aide à ceux qui en auront<br /> besoin, dès le primaire et jusqu'à la troisième. Dans la réalité, les<br /> enfants qui manifesteront aisance et rapidité pour acquérir ce socle<br /> miminum auront la possibilité de choisir des options, de diversifier les<br /> domaines de connaissance, tandis que les autres, ceux qui, pour telle ou<br /> telle raison, connaîtront des difficultés et des retards, peineront sur<br /> leur socle pendant plus de temps, se consacreront exclusivement aux<br /> matières de base (français et maths), et n'auront jamais l'occasion de<br /> découvrir autre chose, d'enrichir leur personnalité au contact de<br /> domaines d'exploration cognitive variés et re motivants. Et oui, après<br /> tout, un futur ouvrier n'a pas besoin d'être cultivé. Dès lors, les<br /> propositions du ministre quant à la possibilité, dès l'école primaire,<br /> de suivre certaines options, revient à opérer une sorte de sélection<br /> ultra précoce (dès l'âge de 8 ans !) qui déterminera les choix futurs.<br /> Quid de la fameuse « école plus juste » ? ?<br /> <br /> Ceci sera encore plus évident au collège : le jeu des options, notamment<br /> en 3e avec cette recommandation de « généraliser l'option découverte<br /> professionnelle » (Document de travail pour la Loi d'orientation publié<br /> par le ministère de l'Education Nationale, p.10), aggravera encore la<br /> fracture entre les enfants doués pour les matières « académiques » et<br /> ceux qui manifesteront des capacités pudiquement évoquées comme des «<br /> talents » différents. Là encore, aux meilleurs les options ouvrant la<br /> voie générale du lycée, et aux autres, les manuels, les lents, les<br /> élèves à problèmes, une option fourre-tout et mal définie qui, pouvant<br /> occuper jusqu'à 6 heures de l'emploi du temps, ferme donc purement et<br /> simplement la porte du lycée en empêchant l'étude d'une deuxième langue<br /> vivante notamment. Combien d'élèves jugés trop peu brillants finiront<br /> donc par grossir les rangs des formations professionnelles sans l'avoir<br /> véritablement choisi, par défaut, par ignorance des stratégies à<br /> adopter, par manque de familiarité avec un système retors et adepte du<br /> double langage ? le choix de cette option est bien une pré-orientation<br /> de fait. Quid de l'école » plus juste » ? ?<br /> <br /> - Le principe de l'attribution de « bourses au mérite » (proposition<br /> n°10), grande marotte de ce gouvernement, choque par son caractère<br /> arbitraire et profondément inique : il s'agira de favoriser les élèves<br /> certes nécessiteux mais doués, sans vouloir même admettre que les<br /> résultats des enfants sont aussi, trop souvent, la conséquence d'un<br /> milieu social, d'un contexte favorable ou défavorable. Cela revient à<br /> pénaliser les enfants pauvres et peu doués, ceux qui auraient justement<br /> besoin que tous les moyens soient mis en oeuvre pour pallier aux<br /> insuffisances financières, sociales, familiales, médicales de leur<br /> situation personnelle. Quid de l'école « plus juste » ? ?<br /> <br /> - Le retour d'une notion jusqu'à présent illégale, les « groupes de<br /> niveau » (proposition n°13), notamment en langues dans le secondaire :<br /> voilà en effet une mesure compatible avec l'idée d'égalité... Toutes les<br /> études effectuées sur le sujet prouvent que des classes hétérogènes<br /> profitent aux élèves en difficulté sans pénaliser ceux qui, de toute<br /> façon, comprennent le fonctionnement du système et savent dès leur plus<br /> jeune âge se conformer au moule académique. C'est donc bien un choix<br /> idéologique et démagogique, celui de trier les élèves, de séparer le bon<br /> grain de l'ivraie, pour sélectionner les gagnants de demain et leurs<br /> futurs subalternes... Quid de l'école « plus juste » ? ?<br /> <br /> - Une école plus « ouverte »... sur l'entreprise : toutes les mesures<br /> annoncées évoquent, en creux, l'obsession ultralibérale du gouvernement.<br /> Toutes les prétendues innovations (et surtout les fameuses options et<br /> filières professionnelles si chaudement recommandées), concourent à<br /> livrer les élèves les moins performants, le plus tôt possible, au marché<br /> économique et à ses exigences, à ses besoins. Cette idéologie est<br /> clairement revendiquée dans le projet Fillon : les experts consultés par<br /> le ministre le déclarent sans ambages : « L'école se doit de prendre en<br /> considération le fait que la vie en société implique une différenciation<br /> des fonctions assumées par les différents individus(...) S'il est<br /> souhaitable que tous les citoyens d'un pays soient compétents en<br /> lecture, tous ne peuvent devenir chirurgiens, avocats ou informaticiens<br /> » ((“ Le collège en Europe. Entre culture de l'intégration et culture de<br /> la différenciation”, rapport de M. Crahay / A. Delhaxe, rapport remis au<br /> PIREF, www.recherche.gouv.fr). On sait que l'inégalité existe, mais de<br /> là à l'encourager et à l'orchestrer dès le plus jeune âge, il y a un<br /> pas, que ce gouvernement n'hésite pas à faire... Quid de l'école plus «<br /> efficace, plus juste, plus ouverte » ? ?<br /> <br /> 2) Un modèle peu rassurant : l'Allemagne<br /> <br /> D'autres spécialistes de l'éducation, curieusement peu fréquentés par<br /> notre ministre, s'alarment de ces choix clairement politiques : ainsi,<br /> François Dubet (dans son ouvrage intitulé L'école des chances. Qu'est-ce<br /> qu'une école juste ?, Ed. du Seuil, septembre 2004) souligne qu' « à<br /> l'école comme à la guerre, ce sont les vainqueurs qui écrivent<br /> l'histoire, pas les vaincus ». Vae victis, donc, et tant pis pour les<br /> pauvres, les faibles, les lents... ceux-là seront orientés précocement<br /> sans deuxième chance possible.<br /> <br /> Ce modèle de sélection précoce existe depuis longtemps en Allemagne, il<br /> est donc assez tentant de vérifier sa prétendue efficacité sur la<br /> réduction des inégalités sociales... L'Allemagne pratique «<br /> l'enseignement séparé » dès la fin de l'école primaire. Un test, vers<br /> l'âge de 10 ans, permet d'orienter les élèves vers trois grandes<br /> filières : les meilleurs fréquentent le Gymnasium, qui débouche sur un<br /> diplôme type bac, ouvrant seul la porte de l'université ; les moyens<br /> fréquentent la Realschule, les moins bons la Hauptschule, deux voies<br /> professionnalisantes. Les compétences, les niveaux, la durée de<br /> l'enseignement, y sont si différents, qu'il est dans les faits<br /> pratiquement impossible de passer de l'une à l'autre. Et, bien plus<br /> grave, des études montrent que, plus que les résultats obtenus aux<br /> tests, ce sont les caractéristiques sociales et familiales qui<br /> déterminent vraiment l'orientation des élèves. Ainsi, un tiers des<br /> élèves de Realschule ont un meilleur niveau général que le plus mauvais<br /> quart des élèves fréquentant le Gymnasium... et 80% des élèves dont les<br /> parents ont le bac vont au Gymnasium, contre seulement 28% de ceux qui<br /> ne l'ont pas (Cf. à ce sujet l'excellent dossier consacré à l'école d' «<br /> Alternatives économiques », n°229, octobre 2004)...<br /> <br /> La sélection précoce, l'enfermement des enfants dans des catégories<br /> hermétiques ne constitueraient<br /> <br /> <br />
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